Santé, numérique et intelligence artificielle

L’avènement de l’intelligence artificielle dans le champ de la santé (somatique et psychique) offre aux patients l’accès à d’autres formes de traitement dont les avantages sont indéniables. Cependant, ces usages multiples et croissants, alliés à des masses de données inédites, soulèvent de nombreuses questions.

Ces nouveaux moyens de « traitement » du sujet humain, rendus possibles par l’essor du numérique, se veulent toujours plus innovants et convoquent ainsi une réflexion interdisciplinaire urgente que ce groupe de travail se propose d’explorer. Le corps humain étant désormais connecté mais surtout de plus en plus « robotisé » à travers les objets implantés, ​quid ​du duo homme/machine et, partant, du devenir du sujet humain ? L’avènement de la téléconsultation et de la télémédecine conduit également à s’interroger sur le nouveau rôle du professionnel et du patient, sur le caractère éclairé du consentement de ce dernier, et sur la métamorphose de la relation thérapeutique.

La e-santé étant destinée à « aider » mais également à « améliorer », ce nouveau dispositif ne flirte-t-il pas avec les idéologies transhumanistes ? Dans cette illusion d’un humain devenant un homme « augmenté », il convient d’appréhender ce phénomène, tant sur le plan éthique, psychologique, sociologique que juridique, afin de mieux comprendre ces techniques émergentes et futures.

À la lumière de réflexions associant les sciences de l’ingénieur (cybersécurité, algorithmie, modélisation de la prise de décision), recherche clinique, recherche médico-économique, réflexion éthique et déontologique, recherche en psychologie et des premiers retours d’expérience d’évaluation d’objets connectés en santé, il s’agit dans ce groupe de travail de s’interroger sur les modalités qui permettront de concilier le développement de ces outils et ses effets sur le sujet contemporain.

Coordination

Ce groupe est coordonné par Cristina Lindenmeyer, psychanalyste (Association psychanalytique de France, APF) et professeure à l’Université Sorbonne Paris Nord (UTRPP). Elle a été en délégation au CNRS en 2016-17, à l’Institut des sciences de la communication, puis chercheuse associée à l’ISCC jusqu’en 2018.

Depuis septembre 2023, la coordination du groupe est aussi assurée par Jean-Marc Deltorn, professeur au Centre d’études internationales de la propriété intellectuelle (CEIPI) de l’Université de Strasbourg.

Activités

Séminaire Dépendances et addictions dans le champ du numérique et de l’IA

Ce séminaire est organisé par Cristina Lindenmeyer. Les séances se déroulent parfois au CIS, 59-61 rue Pouchet, Paris 17e et/ou en visioconférence. L’inscription est requise.

L’utilisation des outils numériques est devenue banale dans notre quotidien et certains auteurs alertent sur une utilisation addictive de ces objets. La problématique de la dépendance et de l’addiction, soit au numérique, à l’internet, à la drogue, au sexe, à la nourriture, est effectivement fréquente dans la pratique clinique actuelle au risque d’une confusion entre ces deux thématiques. En nous appuyant sur les élaborations et les distinctions à faire concernant ces deux thématiques nous essayerons de saisir leurs participations dans l’utilisation des outils numériques actuel

Ce séminaire ouvert aux professionnels ayant une pratique clinique et à toute personne intéressée par ce thème, se propose d’interroger la question de l’investissement psychique déposé dans ces objets, et ses destins dans les situations cliniques ou quotidiennes.

Cinq séances sont prévues en 2023-24.

  • 13 octobre 2023, 10h à 12h
  • 24 novembre 2023, 10h à 12h
  • 1er mars 2024, 10h à 12h
  • 26 avril 2024, 10h à 12h
  • 21 juin 2024, 10h à 12h

Modalités d’inscription en présence ou à distance
Adressez un courrier à cristina.lindenmeyer@univ-sorbonne-paris-nord.fr ou cristina.lindenmeyer@wanadoo.fr.

Débats Santé, numérique et IA

Ce groupe de travail invite régulièrement des chercheurs et chercheuses de différentes disciplines afin de débattre de questions liées à la santé (somatique et psychique) et au numérique. Merci de vous inscrire.

Au temps de la « mort numérique », le deuil ne peut pas se passer du manque et de l’absence

15 mars 2024, 10h à 12h, en visioconférence

L’emballement du 21e siècle au sujet de la « mort de la mort » rencontre un obstacle majeur. Si je peux recréer visuellement mon défunt (hologramme) ou son « style » de communication (IA), comment puis-je admettre sa disparition totale et irréversible ? La douleur de l’absence subite et la place laissée vide par nos morts peuvent-elles être comblées par un avatar et pendant combien de temps ? Face à la demande des endeuillés, stimulés par les partisans des technosciences et par les amateurs de phénomènes spectaculaires, de nombreuses entreprises s’engouffrent dans un nouveau commerce : recréer les morts. Comment les psychologues et psychanalystes réagissent-ils à la supplique des endeuillés en détresse ? Que transmettre à notre société de cette possibilité de conserver des relations artificielles avec les proches disparus ?

Marie-Frédérique Bacqué est psychologue et psychanalyste, professeure de psychopathologie clinique à l’Université de Strasbourg, directrice du CIEM (Centre international des études sur la mort), et rédactrice en chef de la revue Études sur la mort dont le no 157 traitait de « L’éternité numérique » en 2022.

La subjectivité à l’ère numérique : les particularités et les possibilités de la cure psychanalytique

3 novembre 2023, 10h à 12h, en visioconférence

Cette séance porte sur le contexte numérique et ses conséquences sur les symptômes, les relations et son utilisation dans la cure psychanalytique dans l’époque contemporaine. Par conséquent, l’objectif est un débat rigoureux sur le rapport entre la théorie des médias et celle de la psychanalyse pour proposer une réflexion qui met en évidence les spécificités des symptômes actuels et la possibilité, mais également les limites de la cure online.

Leonardo Goldberg est psychanalyste et psychologue, docteur en psychologie de l’Université de São Paulo, chercheur au LabPsi (Laboratoire de Psychanalyse, Santé et Institution à l’Université de São Paulo) et auteur, entre autres, de l’ouvrage Le sujet à l’ère numérique (Almedina, 2021).

LinkRdata : une plateforme d’intégration multi-échelle de données et de logiciels cérébraux

6 octobre 2023, 10h à 12h, en visioconférence

Les avancées continues dans le domaine des techniques d’imagerie par résonance magnétique (IRM) et de diffusion ont conduit à des améliorations significatives en termes de résolution spatiale et temporelle. Ces progrès ont également ouvert de nouvelles perspectives passionnantes pour l’exploration de la connectivité et des interactions entre différentes régions du cerveau. Une communauté dynamique de chercheurs et d’ingénieurs s’est mobilisée pour renforcer la transparence et la diffusion des données générées par ces techniques, mettant ainsi à disposition d’énormes volumes de données pour la communauté scientifique travaillant sur le cerveau. Cependant, la diversité des données et les exigences en matière de puissance de calcul posent des défis considérables pour leur utilisation efficace.
Pour relever le défi d’intégrer des données cérébrales provenant de multiples sources et échelles, nous avons élaboré la plateforme « linkRdata », qui comprend plusieurs logiciels essentiels tels que « linkRbrain, » « linkYOURfiber, » et « linkRbiblio. » Ces outils simplifient le flux de travail en guidant à travers les différentes étapes du traitement de l’imagerie de diffusion, allant de la segmentation à la création du connectome, en passant par la parcellation, le prétraitement, l’enregistrement et la reconstruction. Ces étapes requièrent l’utilisation de neuf logiciels différents au total. De plus, grâce à « linkRbrain » et « linkRbiblio, » il est désormais possible de visualiser directement les résultats et les données issus de l’IRM fonctionnelle sous forme de représentations en 2D et 3D du cerveau. Ces visualisations peuvent être comparées aux connaissances issues de la littérature scientifique et enrichies avec des données provenant du transcriptome ou de l’atlas Talairach. Dans l’ensemble, ces développements contribuent de manière significative à une meilleure compréhension de la complexité du cerveau grâce à une approche intégrée et multidimensionnelle

Dr. Salma Mesmoudi, titulaire d’un doctorat en Intelligence Artificielle et habilitée à diriger des recherches (HDR), travaille en tant qu’ingénieure de recherche à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Son domaine de recherche principal se concentre sur l’intégration multi-échelle de données liées au cerveau, notamment l’IRM fonctionnelle, l’IRM de diffusion, le transcriptome, ainsi que les données liées aux pathologies cérébrales complexes. Parallèlement, elle s’intéresse également à l’application de l’apprentissage automatique pour analyser les discours de patients souffrant de stress post-traumatique, dans le cadre du programme dédié à la mémoire des attentats du 13 novembre 2015 à Paris.

« Transparence(s) et opacité(s) » – entre dévoilement et secret, l’IA et le traitement algorithmique des données

Les données, notamment de santé, sont au cœur d’une nouvelle économie de la prédiction et du contrôle. Ces données représentent la matière première à partir de laquelle des algorithmes catégorisent les individus, en suivent les comportements et permettent de produire de nouvelles formes de services. L’exploitation à grande échelle de ces données – personnelles et non personnelles – au moyen des dernières générations d’applications d’apprentissage automatique et d’« intelligence artificielle » pose aujourd’hui des défis sans précédent au croisement d’enjeux de gouvernance, éthiques, psychologiques, économiques, juridiques et techniques.
Face à ces développements et confrontée à l’opacité (technique et commerciale) des processus de traitement de l’information, la notion de transparence s’est imposée comme l’une des valeurs fondamentales promues par l’UE pour le développement, le déploiement et l’utilisation des systèmes prédictifs basés sur les données. Déjà un élément incontournable du Règlement général sur la protection des données et du Livre blanc sur l’IA publié par la Commission européenne en février 2020, la première proposition législative de l’UE en la matière – la proposition de règlement sur l’intelligence artificielle de la Commission européenne (l’AI Act) – poursuit cette tendance et donne à la transparence une place centrale en incluant plusieurs articles qui lui sont explicitement consacrés. De fait, au-delà même de ces textes et des contraintes légales qu’ils imposent, la transparence semble s’être érigée au niveau d’une exigence morale.
Or, la transparence des systèmes de traitement de données connaît des limites qu’il nous faudra souligner. Limites intrinsèques, liées à l’interprétation et à la variété des sens associés à cette notion fort large, d’une part. Limites pratiques, également, dans sa mise en œuvre réglementaire et technique. Ainsi, après avoir évoqué la place d’un principe de transparence dans le paysage juridique européen, nous présenterons quelques-unes des contraintes s’opposant à son application à l’encadrement du traitement des données et à l’accès à la logique sous-jacente aux modèles prédictifs.

Jean-Marc Deltorn est maître de conférences au Centre d’études internationales de la propriété intellectuelle (CEIPI) à l’Université de Strasbourg et membre de l’Impact of Technology Expert Group à l’European Observatory de l’EUIPO. Au CEIPI, Jean-Marc Deltorn dirige le Diplôme AI&IP et étudie l’articulation entre les technologies numériques émergentes et la dynamique des normes en Europe. Il est titulaire d’un doctorat en astrophysique de l’Université de Paris et d’un doctorat en droit de l’Université de Strasbourg.

ROCS-SHS. Premiers usages d’un dispositif objets connectés en santé

30 entretiens avec des patients, menés durant six mois, ont permis de saisir des premiers usages de l’application MyAir, ou les raisons de son non-usage. Nombreux ne sont pas parvenus à télécharger l’application, d’autres l’ont oubliée. Des témoignages permettent de saisir un certain manque d’informations et d’explications, pour faciliter son accès et ses usages. Pour les usagers étant parvenu à la télécharger, la prise en main et l’adaptation à la machine PPC sont prioritaires. Néanmoins, la consultation de l’application est rapide et quotidienne. Ensuite soit les usagers regardent moins régulièrement l’application, soit explorent davantage l’application. Ils l’apprécient pour relever les données relatives à la machine PPC, puis pour d’autres fonctionnalités, telles les scores, la position du masque, les vidéos notamment. Ces usages font sens et stimulent une posture réflexive à l’égard de leur traitement, mais aussi de l’application elle-même. La culture numérique des répondants autorise à cerner le fait qu’ils accueillent les objets connectés en santé (machine PPC, application, données) dans un non-dit. Cette étude de premiers usages ne permet pas de cerner l’appropriation par les usagers-patients des dispositifs relevant des objets connectés en santé, encore globalement au stade de prémices, voire pour certains en cours.

Geneviève Vidal, enseignante-chercheuse habilitée à diriger des recherches, mène des recherches sur l’informatisation sociale, sur les usages des technologies numériques, en particulier dans le secteur muséal, plus récemment celui de la santé.

Marie-Pia d’Ortho est médecin, professeure à l’Université Paris Cité, directrice scientifique du Digital Medical Hub, cheffe du service de physiologie explorations fonctionnelles de l’hôpital Bichat-Claude‐Bernard, AP‐HP.

Design collaboratif d’un compagnon robotique pour la prise en charge de la dysgraphie chez les enfants présentant des troubles du neurodéveloppement

Dans le cadre d’une recherche-design, nous avons collaboré avec des enfants dysgraphiques présentant divers troubles du neurodéveloppement, et leurs soignants, pour développer les comportements sociaux d’un robot auquel les enfants apprendront à écrire. Cette présentation résumera les résultats de cette recherche, et s’intéressera également à l’activité projective des enfants sur le robot lors de cette co-conception.

Soizic Gauthier est psychologue clinicienne, Assitant Professor of Psychology au sein du Forward College, un nouvel institut de formation associé à l’Université de Londres, et chercheuse associée au sein du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

Les psychothérapies par téléconsultation à l’ère du Covid-19. Des pratiques entre incertitudes, adaptations et renoncements

La crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 a donné une impulsion inattendue au développement de l’offre de soins en santé mentale via les technologies de l’information et de la communication, qui s’effectuait progressivement depuis le début des années 2000. À partir du printemps 2020, nombre de psychothérapeutes, qu’ils soient psychiatres ou psychologues, ont été conduits à expérimenter les téléconsultations – c’est-à-dire des consultations à distance qui s’effectuent par vidéotransmission. Si ces nouveaux usages ont répondu au souci de protéger soignants et soignés et de maintenir le lien avec les patients pendant les périodes de développement de l’épidémie et de confinement, ils ont aussi permis aux praticiens d’apprécier les possibilités et les contraintes liées à la transposition et à l’adaptation de leurs activités usuelles dans ce nouveau contexte d’exercice. Selon quelles modalités les professionnels de la santé mentale se sont-ils engagés dans la réalisation de téléconsultations, sachant que, dans la très grande majorité des cas, ils n’ont pas été formés à celles-ci et ont appris « sur le tas » à développer leur utilisation ?

Initialement, le niveau d’information des psychothérapeutes est très faible en matière de consultation à distance : c’est dans la pratique qu’ils découvrent et éprouvent la nécessité de s’adapter, ainsi que les efforts et les renoncements auxquels il faut consentir. Dans quelle mesure sont-ils parvenus à adapter leurs techniques usuelles et à développer des pratiques nouvelles dans ce cadre d’activité ? Quels sont, globalement, les effets de l’intégration des dispositifs de téléconsultation sur la relation et les pratiques psychothérapeutiques ? Quelle est l’ampleur des transformations liées à l’exercice clinique à distance ? Dans quelle mesure celles-ci invitent-elles les praticiens à réinterroger leurs conceptions de la clinique et de la relation psychothérapeutique et, ainsi, à « faire vivre » leur métier ?

Afin de répondre à ce questionnement, la présentation se fondera sur une enquête de terrain qui a eu lieu plusieurs années avant la crise sanitaire, ainsi que sur des données et des témoignages produits durant celle-ci. Alexandre Mathieu-Fritz reviendra notamment sur l’expérience des membres de la société Télé-med, dont les praticiens appartiennent à deux groupes professionnels distincts, les psychiatres et les psychologues, et ont pour caractéristique commune de réaliser des psychothérapies dans le cadre de leur pratique traditionnelle, en face-à-face, mais également dans celui des téléconsultations.

Alexandre Mathieu-Fritz est professeur de sociologie à l’Université Gustave Eiffel, chercheur au Laboratoire Techniques Territoires et Sociétés (LATTS UMR CNRS 8134), sociologue du travail, des organisations et des groupes professionnels. Ses travaux se situent à la croisée des sociologies de l’activité (practice-based studies), des TIC et de l’innovation, et sont consacrés à l’étude de l’intégration des outils numériques dans le monde de la santé. Un ouvrage présentant ses travaux de recherche, Le praticien, le patient et les artefacts. Genèse des mondes de la télémédecine (Paris, Presses des Mines), a été publié en 2021. Il est aussi l’auteur de plusieurs articles, dont « L’intelligence artificielle en médecine : des promesses aux usages… en passant par la conception. Commentaire », Sciences sociales et santé, 2021/2 (Vol. 39). Il démarre actuellement deux recherches, l’une sur l’utilisation d’outils connectés d’autosurveillance de la mucoviscidose, l’autre sur le développement des usages de l’IA (en tant qu’outil d’aide au diagnostic) dans le domaine de la dermatologie.

2020/22

Projet de recherche « Enjeux et effets des dispositifs numériques sur la relation médicale – au prisme du traitement du syndrome des apnées du sommeil »

Le premier semestre 2020 a permis de déterminer un thème fédérateur pour nos échanges interdisciplinaires sur la santé, numérique et IA. Le thème choisi a été « la problématique de l’automatisation », qui nous a amené à la construction du projet interdisciplinaire « Enjeux et effets des dispositifs numériques sur la relation médicale au prisme du traitement du syndrome des apnées du sommeil en période de Covid-19 ». En mai 2020, nous avons obtenu un financement de l’Institut la Personne en médecine (ILPEM) de l’USPC pour cette recherche. Notre objectif est de mener une analyse interdisciplinaire des enjeux et effets des dispositifs numériques dans la relation médecin/patient, spécialement dans le cadre d’une maladie chronique (apnées du sommeil), en prenant en compte l’augmentation du recours à ces dispositifs depuis la pandémie de Covid-19.

Le deuxième semestre de l’année 2020 a été consacré à la mise en place et au démarrage du projet. En novembre 2020, le questionnaire destiné à 20 médecins impliqués dans le suivi de patients porteurs de syndrome d’apnées du sommeil a été finalisé. En décembre 2020, le questionnaire auto-administré en ligne par les médecins participant à la recherche a été mis en place. Ces entretiens se sont déroulés dans les premiers mois de 2021.

Résumé

Le syndrome d’apnées du sommeil constitue une pathologie extrêmement fréquente, posant un défi en matière de santé publique. Ils sont traités en première intention par ventilation en pression positive continue (PPC). Depuis le milieu des années 1990 les PPC sont équipées de mémoire interne qui permet de collecter les données respiratoires des patients, renseignant ainsi à la fois quant à l’efficacité du traitement et à son observance. Ces données étaient collectées par l’intervenant au domicile et transmises au médecin sous forme papier donnant à celui-ci une vision différée rétrospective. Ce dispositif s’est enrichi à partir du milieu des années 2000 de la possibilité pour le médecin de les consulter sur des sites internet sécurisés administrés par les prestataires de santé à domicile (PSAD), permettant de s’affranchir du courrier papier, cependant la temporalité restait celle de l’analyse rétrospective. Depuis cinq ans les machines de PPC sont « communicantes », dotées de technologie permettant d’envoyer quotidiennement les données directement vers des serveurs consultables par les médecins. Réciproquement il est possible à la fois pour le médecin, ou pour le PSAD sur prescription médicale, de modifier le réglage de la machine à distance.

La pandémie de SARS-coV-2 a été un puissant accélérateur de la mise en œuvre de ces dispositifs, en raison des nécessités de distanciation physique imposée par maladie COVID-19. Dans le cadre de PPC, si les médecins ont à leur disposition l’ensemble de toutes les données médicales de leurs patients et doivent décider en fonction, il est prévu d’y introduire des techniques d’intelligence artificielle pour former un système à initiative mixte : la machine fournit à l’humain des informations ou des estimations concernant la « bonne » décision et l’humain décide au final.

Le syndrome d’apnées du sommeil constitue une pathologie extrêmement fréquente, posant un défi en matière de santé publique. Ils sont traités en première intention par ventilation en pression positive continue (PPC). Depuis le milieu des années 1990 les PPC sont équipées de mémoire interne qui permet de collecter les données respiratoires des patients, renseignant ainsi à la fois quant à l’efficacité du traitement et à son observance. Ces données étaient collectées par l’intervenant au domicile et transmises au médecin sous forme papier donnant à celui-ci une vision différée rétrospective. Ce dispositif s’est enrichi à partir du milieu des années 2000 de la possibilité pour le médecin de les consulter sur des sites internet sécurisés administrés par les prestataires de santé à domicile (PSAD), permettant de s’affranchir du courrier papier, cependant la temporalité restait celle de l’analyse rétrospective.

Depuis cinq ans les machines de PPC sont « communicantes », dotées de technologie permettant d’envoyer quotidiennement les données directement vers des serveurs consultables par les médecins. Réciproquement il est possible à la fois pour le médecin, ou pour le PSAD sur prescription médicale, de modifier le réglage de la machine à distance.

La pandémie de SARS-coV-2 a été un puissant accélérateur de la mise en œuvre de ces dispositifs, en raison des nécessités de distanciation physique imposée par maladie COVID-19. Dans le cadre de PPC, si les médecins ont à leur disposition l’ensemble de toutes les données médicales de leurs patients et doivent décider en fonction, il est prévu d’y introduire des techniques d’intelligence artificielle pour former un système à initiative mixte : la machine fournit à l’humain des informations ou des estimations concernant la « bonne » décision et l’humain décide au final.

FINANCEMENT

Ce projet, déposé par le groupe de travail Santé, numérique et IA du GDR Internet, IA et Société, a été financé par l’Institut la Personne en médecine (ILPEM), Université Sorbonne Paris Cité.

Participants

Porté par Cristina Lindenmeyer (psychanalyste, professeure de psychopathologie à l’Université Sorbonne Paris Nord, UTRPP), ce projet a réuni Yanita Andonova (MCF en sciences de l’information et de la communication, LabSic, Université Sorbonne Paris Nord), Jean-Michel Besnier (professeur émérite de philosophie à Sorbonne Université), Grégory Bonnet (MCF HDR en informatique, GREYC, Université de Caen Normandie), Bénédicte Bévière-Boyer (MCF HDR en droit privé et sciences criminelles, Université Paris 8), Michael Chocron (psychologue clinicien, ATER à l’Université Sorbonne Paris Nord), Jean-Marc Deltorn (chercheur au Centre d’études internationales de la propriété intellectuelle, CEIPI, Université de Strasbourg), Aloïse Quesne (MCF en droit, CRLD, Université Paris-Saclay, Evry Val d’Essonne, membre associé de l’Institut Demolombe, Université de Caen Normandie), Marie-Pia d’Ortho (médecin, professeure à l’Université de Paris, directrice scientifique du Digital Medical Hub, directrice du service de physiologie, explorations fonctionnelles de l’hôpital Bichat-Claude‐Bernard, AP‐HP), Gérard Reynier (psychologue clinicien à l’hôpital Saint-Louis), Geneviève Vidal (MCF HDR en sciences de l’information et de la communication, LabSic, Université Sorbonne Paris Nord).

Ce rapport de recherche, disponible en téléchargement (pdf), a été présenté à Paris et en visioconférence, vendredi 20 mai 2022.

Programme

Mot d’accueil de Francesca Musiani (CIS-CNRS), directrice adjointe du Centre Internet et Société et du GDR Internet, IA et Société

I. Restitution des résultats de l’étude

Avec Cristina Lindenmeyer, Yanita Andonova, Jean-Michel Besnier, Grégory Bonnet, Bénédicte Bévière-Boyer, Michael Chocron, Jean-Marc Deltorn, Marie-Pia d’Ortho, Aloïse Quesne, Gérard Reynier, Geneviève Vidal.

a. Présentation générale du projet de recherche
– Accélération et saturation
– Autonomie et délégation
– Pratiques et projections
– Transparence et surveillance
b. Quatre axes thématiques
c. Conclusion et perspectives

II. Table ronde

« Enjeux et perspectives des transformations numériques du secteur de la santé »

Avec Pierre-Alain Raphan, député de l’Essonne, membre du groupe d’étude « Économie numérique de la donnée, de la connaissance et de l’intelligence artificielle » de l’Assemblée nationale.

Résumé du rapport de recherche

Tablettes, smartphones, plateformes numériques, objets connectés avec ou sans intelligence artificielle (IA) envahissent désormais notre quotidien, transformant nos relations aux autres. Après leur entrée dans le champ du bien-être, depuis quelques années c’est vers le champ de la santé que se tournent les attentes et l’espoir suscités par ces nouveaux dispositifs technologiques. C’est pourquoi, en 2019 la résolution du Parlement européen « sur une politique industrielle européenne globale sur l’intelligence artificielle et la robotique » invite à la prudence quant à l’utilisation de procédés algorithmiques dans le champ médical, soulignant que « le système actuel d’approbation des dispositifs médicaux pourrait ne pas être adapté aux technologies de l’IA ». En nous appuyant sur le cadre du traitement de l’apnée du sommeil par ventilation en pression positive continue (PPC), notre réflexion met en lumière le fait que l’augmentation de la masse de données, l’accélération de l’information, la disparité de l’attrait et des compétences en informatique et en IA des acteurs (patients et médecins), ainsi que les effets subjectifs que cela impose, conduisent à la recomposition de la relation patient/médecin et la transformation de la pratique médicale.

Cristina Lindenmeyer, Bénédicte Bévière-Boyer, Michael Chocron, Yanita Andonova, Jean-Michel Besnier, Bonnet Grégory, Jean-Marc Deltorn, Marie-Pia d’Ortho, Aloïse Quesne, Gérard Reynier, Geneviève Vidal, « Chapitre 6. The challenges and effects of digital medical devices on the doctor-patient relationship, as seen through the lens of treating sleep apnoea », Journal international de bioéthique et d’éthique des sciences, 2023/1, vol. 34, p. 91-127, doi: 10.3917/jibes.341.0091.

École d’été 2021 sur l’IA responsable

Exposé de Cristina Lindenmeyer, « Approche psychanalytique de la dépendance aux technologies numériques et à l’IA », École d’été sur l’IA responsable. Santé durable et changement climatique.

Cet évènement a été organisé par le Sorbonne Center for Artifical Intelligence (SCAI) et l’Observatoire international sur les impacts sociétaux de l’IA et du numérique (OBVIA), 30 août au 3 septembre 2021.

Publication Santé connectée, sous la direction de Cristina Lindenmeyer et Marie-Pia d’Ortho, CNRS Éditions, coll. « Les Essentiels d’Hermès », nov. 2020, 216 p.

Écrans, claviers, souris, plateformes, internet des objets et « intelligence » artificielle envahissent désormais notre quotidien et transforment nos relations aux autres. Après leur entrée dans le champ du bien-être et du quantified-self, des industriels explorent celui de la santé, champ d’autant plus prometteur qu’il offre – avec la chronicisation de certaines maladies infectieuses ou cancéreuses et l’augmentation du vieillissement de la population –, de nombreux domaines d’application. De son côté, la situation actuelle de la crise sanitaire du Covid-19 a modifié en quelques mois des pratiques enracinées depuis des décennies dans le champ de la santé.

Les attentes et les espoirs sont immenses, de même que les questions soulevées par ces nouveaux dispositifs. Car au-delà de leur capacité à démontrer leur efficacité et l’efficience de leur utilisation à améliorer véritablement le parcours du patient, ces objets connectés produisent un changement de l’expérience intime du sujet avec lui-même. Ils interfèrent également dans la façon dont la relation thérapeutique entre le patient et l’équipe médicale, va pouvoir se nouer. Avec un risque majeur : une dépendance technologisée.

Les auteurs, ici réunis, exposent plus qu’un simple paysage de l’utilisation de ces nouveaux objets en santé. Ils en soulignent les limites, les paradoxes et les enjeux qu’ils posent à notre définition de l’humanité.

Auteurs

Jean-Michel Besnier, Grégory Bonnet, Vincent Bunel, Jean-Marc Deltorn, Philippe Drweski, Hervé Dumez, Rodolphe Gouin, Camille Jean, Cristina Lindenmeyer, Étienne Minvielle, Marie-Pia d’Ortho, Aloïse Quesne.